Le froid alimentaire commercial
Mis à jour le 17/12/2014
Présent dans les hypermarchés, supermarchés, petits commerces équipés de groupes à condensation ou groupes hermétiques et distributeurs automatiques, le froid alimentaire commercial peut être produit par divers principes plus ou moins énergivores.
Le froid est produit par compression de vapeur, gaz à froid, effet thermoélectrique, absorption, Vortex… Procédé inverse des pompes à chaleur, les systèmes à compression de vapeur (condensation de vapeur d’un fluide frigorigène après compression et son évaporation par détente) sont les plus employés pour produire du froid. Ils sont à piston, à vis, scroll (à spirales), à turbocompresseur ou à éjection de vapeur. Parmi les fluides frigorigènes, figurent les HFC (hydrofluocarbures), les HCFC (hydrochlorofluorocarbures), les CFC (chlorofluorocarbures), mais aussi d’autres fluides dont l’éthane, l’isobutane, le propane, le cyclopropane. Pour ces derniers, les quantités autorisées par installation (150 g) sont trop faibles pour un usage industriel.
Plusieurs dispositions relatives aux fluides utilisés ont été élaborées fixant les conditions d’éradication des substances appauvrissant la couche d’ozone ou relatives à la réduction des gaz à effet de serre.
Les CFC sont strictement interdits depuis fin 2001 et les HCFC ne sont plus utilisés dans la fabrication de nouveaux équipements frigorifiques depuis 2010. De même, les HCFC retraités ou recyclés (dont le R22) ne sont plus en service depuis la fin 2014. En revanche, les HFC (exempts de chlore) sont toujours employés. Leur remplacement progressif sera réalisé par des frigorigènes dits « naturels » comme l’ammoniac, le CO
2 ou l’emploi conjoint des deux (système « cascade » NH3/CO
2).
Les fluides frigorigènes s’emploient dans le système de froid dit en « détente directe ». Dans ce type d’alimentation, le fluide change d’état dans l’évaporateur en passant du stade liquide à celui de vapeur. Concernant les fluides frigoporteurs, on distingue les monophasiques (liquides) et les diphasiques (à base de mélange « liquides/solides »). Ils sont utilisés dans le système de froid dit « indirect ». En permettant la transmission du froid produit par un générateur, ils sont efficaces et réduisent sensiblement les coûts de production.
Les fluides utilisés
Au sein de la famille des HFC, la tendance était, depuis les années 2000, à l’utilisation quasi exclusive du R-404A dans les installations neuves de froid commercial centralisé, et principalement en détente directe.
Cependant, étant donné les coûts d’une nouvelle installation, la préoccupation de plus en plus présente de limitation du niveau des émissions et devant la crainte d’une interdiction des HFC à fort GWP, de nouvelles solutions techniques visant à limiter la charge en fluides et l’utilisation de fluides à plus faibles GWP sont désormais envisagées. Des évolutions techniques récentes permettent désormais d’introduire, en système indirect, des fluides jusqu’alors inutilisés sur les installations centralisées :
- le R-134a, utilisé également en système direct pour les petites surfaces ;
- le R-407C ;
- le R-410A, plus rare.
Ces fluides sont également utilisés, en froid négatif dans les systèmes cascades CO
2 qui connaissent un fort démarrage depuis 2009.
Impact énergétique du froid alimentaire
Les consommations électriques de l’ensemble du poste froid alimentaire (chambres froides, salles de travail des boulangeries, boucheries, meubles frigorifiques des aires de vente) représentent :
- - 30 à 40 % de la consommation électrique d’un hypermarché ;
- - 35 à 50 % pour un supermarché ;
- - 70 % pour une supérette.
L’énergie nécessaire à la production frigorifique (compression) est de l’ordre de 65 % de la consommation électrique du poste froid alimentaire.
Pour l’ensemble du froid, positif et négatif, les hypermarchés et supermarchés totalisent pour leur part 3,2 TWh/an, soit 56 % des consommations totales de froid de la branche commerces.
Année 2002
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Capacité totale de conservation
Milliers de m3 |
Consommation d’électricité pour la production de froid |
---|
Froid négatif
|
Froid positif
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Totale GWh/an
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---|
Hypermarchés
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250
|
1 000
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1 501
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Supermarchés, magasins populaires, grands magasins
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250
|
800
|
1 713
|
Autres : commerces de gros alimentaire, boucheries, charcuteries, poissonneries, boulangeries, commerces de produits surgelés (gros et détail), supérettes, alimentations générales, crémeries, distributeurs automatiques…
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8 840
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7 104
|
2 569
|
TOTAL
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1 384
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8 904
|
5 783
|
Source : Ceren
Potentiel d’économie d’énergie
Par rapport à ces enjeux énergétiques et environnementaux, différentes actions d’optimisation peuvent être conduites sur les installations de froid alimentaire des commerces, aux différents points clés de ces installations, avec le souci permanent du confinement des fluides frigorigènes utilisés :
- au niveau des machines de production de froid : régulation de la pression de condensation, récupération de la chaleur produite ;
- au niveau de la distribution du froid : utilisation de fluides frigoporteurs monophasiques ou diphasiques ;
- au niveau des meubles de vente : traitement du givrage, isolation par rapport à l’ambiance (rideaux, portes).
Régulation de la pression de condensation
La facture énergétique due à la compression, loin d’être négligeable, peut être abaissée de 25 % en réduisant le plus possible le taux de compression, c’est-à-dire en abaissant la haute pression (HP) lorsque les conditions extérieures sont favorables (gains potentiels importants en hiver). Au lieu de maintenir toute l’année des températures de condensation de 40 à 42 ℃ (fonctionnement type été), l’on peut, compte tenu des conditions météo, obtenir des températures de condensation de 20 à 25 ℃ une grande partie de l’année.
Trois systèmes, entre autres, permettent de profiter de températures extérieures favorables, tout en autorisant un fonctionnement optimal de l’installation frigorifique :
- la détente électronique : régulateur auto-adaptatif ; règle le débit de fluide frigorigène, permettant de s’affranchir d’une HP constante grâce à la mécanique du système qui est totalement différente du détendeur thermostatique classique ;
- la détente intermédiaire (ou batch expansion) : permet de baisser la pression de condensation, tout en maintenant une pression en amont des détendeurs pratiquement constante (plutôt dédié aux installations avec compresseurs à vis) ; le rendement des évaporateurs est amélioré de 15 à 20 % par rapport à une installation simple détente ;
- le détendeur à orifices multiples : cette vanne thermostatique permet de réagir avec précision aux conditions de fonctionnement frigorifique les plus extrêmes.
Récupération de la chaleur produite
Bien souvent, la chaleur produite par le système de production de froid est rejetée à l’extérieur (condenseur à air, condenseur évaporatif, tour de refroidissement…).
Or, il est possible de récupérer une partie de cette énergie :
- pour le préchauffage de l’ECS ;
- pour le préchauffage des réserves et/ou des bureaux.
Il existe des techniques de récupération variées :
- préchauffage de l’ECS par désurchauffe des gaz ou à partir du refroidissement de l’huile des compresseurs à vis (avec des échangeurs intermédiaires sur le circuit ;
- préchauffage des locaux par récupération, soit en faisant passer directement l’air des locaux à chauffer sur le condenseur de l’installation frigorifique, soit par l’intermédiaire d’un condenseur spécial de récupération à air, soit encore par l’intermédiaire d’une PAC eau/eau installée sur le circuit. Pour le préchauffage des locaux, on peut récupérer ainsi 50 à 80 % des besoins.
Actions au niveau de la distribution de froid
De plus en plus se développent des systèmes de distribution utilisant un fluide frigoporteur qui alimente les échangeurs dans les meubles réfrigérés (froid positif). Le fluide frigorigène est ainsi confiné dans les centrales frigorifiques uniquement (sauf pour le froid négatif). Pour l’instant, on utilise surtout un frigoporteur monophasique : l’eau glycolée.
La consommation est un peu plus importante (10 %) que pour un système à détente directe, mais ces systèmes à frigoporteur sont intéressants à plusieurs titres :
- mise en œuvre et entretien ;
- régulation plus fine ;
- souplesse d’aménagement de l’aire de vente ;
- dégivrage moins fréquent des vitrines standard ;
- récupération de chaleur ou de froid plus facile ;
- diminution considérable de la quantité de fluide frigorigène de l’établissement.
Aujourd’hui, se développent également les fluides diphasiques, appelés « sorbets » composés d’un mélange liquides/solides à partir d’une émulsion eau + fluide.
Ils présentent de gros avantages :
- utilisation de la chaleur latente du fluide, d’où environ cinq fois moins de débit à véhiculer et des consommations d’énergie environ 25 % moins importantes qu’en monophasique ;
- possibilité de stocker le « sorbet », d’où un écrêtage possible des pointes de puissance.
Actions au niveau des meubles de vente
Il s’agit principalement de :
- la limitation du givrage et de ses effets négatifs (surconsommation, non-respect de la qualité des produits) ;
- l’utilisation de batteries d’évaporateur multi-étagées (un étage est en dégivrage tandis que les autres produisent du froid) ;
- la déshumidification de l’air devant les MFV verticaux ouverts (par soufflage laminaire en rideau d’air devant les meubles) ;
- la possibilité de déshumidifier l’air du magasin (action au niveau des centrales de traitement d’air) ;
- la mise en place de rideaux isolant les vitrines de l’ambiance, la nuit en particulier, ainsi que les jours de fermeture (réduction possible de 25 % des consommations), ou mise en place de couvercles ou portes sur les vitrines et bacs de surgelés.
L’économie d’énergie est, par exemple dans le cas de la mise en place de portes sur les MFV, estimée à 1 610 GWh/an, soit 39 % de la consommation de référence.
Un engagement volontaire, collectif et ambitieux
À travers la signature d’une convention entre le ministère du Développement durable et la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, les enseignes de distribution alimentaire
s’engagent à installer des portes sur les meubles frigorifiques de vente dans tous les projets de réouverture ou de construction de magasin, ce qui représente chaque année 1 200 chantiers environ.
D’ici à 2020, 75 % des meubles frigorifiques de vente devront être progressivement fermés. Ainsi, en 2015, 25 % des meubles frigorifiques de vente devront être équipés de portes. Sur la période 2012-2020, cet engagement produira au total 11 TWh d’économie d’énergie.
Afin de favoriser le déploiement de la démarche, les enseignes qui choisiront de fermer leurs meubles frigorifiques avec des portes en double vitrage pourront bénéficier de certificats d’économies d’énergie (CEE).